Publié le 22/07/2019
« C'est un apaisement extraordinaire », confirme Thérèse Scheirmann-Descamps, la veuve d'un des marins, Jules, disparu le jour de ses 29 ans. | BORIS HORVAT / AFP
Soulagées, mais aussi surprises par l’aboutissement des recherches, 51 ans après la disparition du sous-marin La Minerve au large de Toulon, des familles des sous-mariniers font part de leurs réactions, entre « apaisement extraordinaire » et émotion qui « remonte à la surface ».
« J’ai toujours été persuadé qu’on le retrouverait un jour ». L’attente d’Hervé Fauve, le fils du commandant de La Minerve, a pris fin dimanche soir. 51 ans après, l’épave du sous-marin qui a englouti son père a enfin été localisée, au large de Toulon.
« Nous attendions depuis tellement longtemps. Mais nous avions appris à être patients ! C’est un soulagement, une énorme émotion » : âgé de 5 ans et demi au moment du drame, le 27 janvier 1968, il n’a jamais cessé d’espérer, « persuadé qu’on retrouverait un jour » ce père dont « il se souvient dans les moindres détails ».
Avec son site Internet, consacré à la catastrophe, il a rassemblé les proches des victimes. Au fil des années, il a retrouvé 41 des 52 familles touchées par le drame, 104 personnes au total. Obtenant finalement le redémarrage des recherches de l’épave, le 4 juillet. Et depuis lundi matin et l’annonce officielle de la localisation de l’épave du sous-marin militaire construit à Nantes, il les prévient, par courriel, par téléphone.
« Ils sont abasourdis, certains se sont écroulés, en pleurs. En fait, moins les personnes espéraient, plus le choc est violent », explique-t-il.
« C’est un apaisement extraordinaire », confirme Thérèse Scheirmann-Descamps, la veuve d’un des marins, Jules, disparu le jour de ses 29 ans : « En fait, je me sens envahie par une grande sérénité, le fait de savoir enfin où se trouvent mon mari et tous ses camarades. Il n’y a pas vraiment de mots pour décrire cette émotion. Je suis heureuse. Mais surtout apaisée ».
« Faire notre deuil »
« Finalement, ils étaient près de nous, pas loin », soupire-t-elle. Dans la coque de La Minerve, brisée en trois morceaux, par 2 370 m de fond, à 18,5 milles (35 km) des côtes. « J’étais confiante », poursuit celle qui était au moment du drame une jeune mère de deux enfants âgés de 3 et 5 ans : « Mais je ne pensais pas que cela irait si vite… »
Lundi, c’est la gratitude aussi qui l’envahissait : « Pour toutes les personnes qui ont œuvré pour cette découverte. Et pour Mme Parly (Florence Parly, la ministre des Armées, ndlr), qui a su nous écouter ».
« Je suis plutôt ému, j’en ai les larmes aux yeux » : Jacques Dannay, le fils d’un autre de ces 52 sous-mariniers disparus, ne s’y attendait pas. Pas si vite en tout cas. « Cela fait tellement longtemps, j’ai encore du mal à y croire. Mais nous allons enfin pouvoir faire notre deuil ».
Jacques avait 3 ans quand son père a disparu. « La mer est méchante », ne cesse-t-il alors de répéter, pour expliquer cette absence soudaine. Et il met des années à comprendre : « Ma mère évitait le sujet. Ce matin je lui ai envoyé un texto, pour la prévenir. Puis je l’ai eue au téléphone. Elle est triste, bien sûr, tout est remonté à la surface, d’un seul coup ».
« Mais c’est quand même une belle journée, triste mais très belle », insiste-t-il : « Et un soulagement. Inconsciemment, on imagine tout, dans un coin du cerveau. Ça peut être con, le cerveau. Mais là, enfin, la réalité s’impose. Vous ne pouvez pas comprendre à quel point c’est important ».